Sinan Ersin, un parcours imprégné de culture française

NDLR : Article d'archive remis en ligne (cf. Crescendo no.7, Mai 2022 "La France à Istanbul, une présence durable")

Dans le cadre du dossier central de cette édition de Crescendo, nous avons interviewé Sinan Ersin, ancien élève du Lycée Français de Pierre Loti et actuellement responsable culturel de l’Institut Français de Turquie se situant à Istanbul afin afin qu’il nous transmette le parcours qu’il a suivi jusqu’à présent et des informations sur le rôle culturel que joue l’IFT à Istanbul.

Quel métier exercez-vous actuellement ? Sur quoi porte-t-il ?

Je suis le responsable culturel de l’Institut Français de Turquie à Istanbul. Cela consiste à organiser divers évènements promulguant la francophonie dans notre pays à travers notamment des pièces de théâtre, des expositions artistiques dont du street art et des arts numériques ainsi que des concerts.

Quelles études avez-vous faites ?

J’ai commencé à étudier au Lycée Français Pierre Loti d’Istanbul à l’âge de 3 ans et c’est ici que j’ai poursuivi la totalité de mes études secondaires. J’avais fait la filière qui dans l’ancien système était nommée l’ES (économique et social). C’est également dans cette école que j’ai fait la connaissance de la culture française. Par la suite, je suis allé en France pour mes études supérieures. Dans un premier temps, j’ai étudié les Sciences Politiques et le droit à l’Université de Montpellier. Cependant, peu après, je me suis rendu compte que ce sujet ne me passionnait pas véritablement et c’est ainsi que j’ai pris la décision de passer à l’université de Lorraine à Nancy où j’ai obtenu ma licence en information et communication. De plus, ma dernière année, je suis allé à Malaga en Espagne au sein du programme Erasmus où j’ai étudié la communication audiovisuelle et les relations publiques.

Sinan Ersin

Comment votre carrière dans le secteur culturel a-t-elle commencée, d’où est venue l’envie de vous diriger vers ce métier ?

C’est honnêtement par chance que j’ai obtenu cette opportunité. Ce n’était pas quelque chose de prévu ou que je désirais depuis longtemps. À la suite de mes études à l’université je faisais un stage au Conseil de l’Europe à Strasbourg. Cela portait majoritairement sur la communication et la diplomatie. Je suis ensuite retourné à Istanbul. Je ne savais pas quoi faire et j’ai travaillé dans le secteur touristique en utilisant l’avantage que m’apportait le fait de parler plusieurs langues. Néanmoins, cela n’était pas le métier que je voulais véritablement exercer. J’étais en recherche d’un travail et c’est alors que j’ai vu que le poste d’assistant de l’attaché audiovisuel de l’Institut était disponible. Nous pouvons donc dire que c’est en 2018 que je me suis retrouvé à travailler dans le secteur culturel. Cependant, il est important de préciser que j’étais toujours intéressé par la culture. J’apprécie depuis mon enfance d’aller aux concerts ou de contempler des expositions. 

Quels ont été les étapes que vous considérez importantes dans le parcours vous menant jusqu’à votre poste actuel ?

Comme vous pouvez le constater, j’ai eu l’opportunité de tenter ma chance dans une multitude de secteurs afin de trouver ce qui me plaisait véritablement. Il y a eu des moments où j’ai eu du mal à trouver un sujet qui me passionnait mais que ce soit le stage que j’ai fait au Conseil de l’Europe ou la période où j’ai travaillé dans le tourisme, toutes les expériences m’ont véritablement influencé. En outre, au sein de L’IFT, il y a eu quelques étapes qui peuvent être considérées comme importantes. Notamment, après avoir commencé à travailler comme l’assistant de l’attaché audiovisuel, j’ai eu l’opportunité de travailler avec lui pendant un an, ce qui était très formateur pour moi. J’ai ainsi connu un secteur qui était nouveau pour moi. C’est un an après que le poste de responsable culturel est devenu disponible, ce qui m’a permis d’obtenir mon poste actuel et mon nouveau métier. Si je regarde les différentes étapes de mon parcours, je peux dire que j’ai essayé plusieurs métiers différents et il me semble que c’est ceci qui a joué le rôle le plus important dans mon parcours. 

Comment votre éducation dans une école française a-t-elle influencé votre carrière ?

D’une part, ayant fait mes études supérieures en France, il est évident que Pierre Loti m’a en quelque sorte guidé tout au long de mon parcours. Il est évident que mon apprentissage du français m’a offert divers avantages. Sachant que depuis plus de trois ans je travaille dans l’Institut Français, ma connaissance de la langue aussi bien que de la culture française sont les éléments me permettant d’exercer mon métier. Notamment, il m’est très bénéfique d’avoir grandi dans un milieu francophone, étant donné que cela m’a familiarisé avec différentes normes françaises et m’a permis de connaître plusieurs artistes français reconnus dans le secteur culturel. Il me semble que l’ensemble de ces éléments qui m’ont été inculqués très jeune me permet chaque jour de promouvoir la culture française de la meilleure façon possible. 

D’un point de vue personnel, quels sont les éléments que vous préférez dans votre métier ? Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?

D’une part, être en contact avec des organisateurs et des artistes et pouvoir constamment interagir avec eux me plait beaucoup. De plus, la diversité des activités est un autre élément que je trouve très intéressant. Nous organisons par exemple des concerts de jazz, de musique électronique ainsi que des pièces de théâtre et des dispositions d’arts numériques. Je trouve cela très enrichissant.

D’autre part, il est évident que la pandémie a affecté mon métier significativement et a compliqué la mise en place des évènements. Les restrictions ont compliqué l’organisation de plusieurs activités, ce qui est loin d’être idéal. Je pourrais également  dire qu’il y a des périodes où nous sommes très occupées et devons réaliser plusieurs évènements au cours d’une même semaine. Même si j’apprécie véritablement mon métier, assister à plusieurs expositions et concerts dans une semaine peut devenir fatiguant. Personnellement, je perds alors l’envie de faire ces activités dans ma vie personnelle, ce qui peut être considéré comme un point négatif. Il est cependant évident que ce sont des inconvénients mineurs. 

Quelles études sont envisageables pour des personnes s’intéressant au secteur culturel ? Quels seraient vos conseils pour ces personnes ?

Personnellement, comme je l’ai précisé, les études que j’ai faites n’étaient pas en relation avec le secteur culturel. Cependant, il me semble qu’il y a de plus en plus de facultés d’événementiels qui s’ouvrent dans les universités, où l’on apprend à organiser et préparer des évènements culturels et cela transmet également aux élèves un savoir de coordination. Il serait également possible de poursuivre un parcours supérieur en communication où on apprend à gérer les relations publiques, ce qui est bénéfique. Il est toujours possible de faire des stages, ce qui permet de gagner de l’expérience. Je pense quand-même que c’est la volonté qui est essentielle, quoi qu’il en soit. Je conseillerai alors à ces personnes de ne pas avoir peur de changer d’avis et de poursuivre leur passion malgré les difficultés qu’ils pourront rencontrer. 

Le numéro portant sur la présence française et francophone à Istanbul, comment pensez-vous que cette « présence » a évolué au cours des dernières années ? Comment, en tant qu’IFT, contribuez-vous à cette rencontre de deux cultures ?

D’un point de vue personnel, je pense que la francophonie est très développée en Turquie grâce aux lycées français comme Pierre Loti à Istanbul et Charles de Gaulle à Ankara mais aussi grâce aux différents lycées francophones attachés au ministère de l’éducation turque et enseignant la langue française. Il me semble que le nombre de francophones dans notre pays est plutôt élevé, ce qui montre la présence de la culture. Je pense que la francophonie continue à se répandre aussi par l’intermédiaire de ces écoles. 

En outre, en tant qu’IFT, nous essayons de promouvoir la culture française chaque jour. Afin de faire cela, nous organisons des cours de langue française, mais également mettons en place des évènements où nous invitons différents artistes français pour contribuer à la rencontre de nos deux cultures. De plus, durant le mois de mars qui est également pour nous tous le mois de la francophonie, nous nous focalisons davantage sur ce sujet en travaillant ensemble avec les écoles francophones et en diversifiant les activités.

Pouvez-vous nous citer un projet dont vous avez fait partie, mis en place par l’IFT et qui vous a particulièrement marqué ? Avez-vous de futurs projets que vous voudriez partager avec nous ?

Ces derniers temps, nous essayons de promouvoir de plus en plus le “street-art” ainsi que l’art numérique. Nous avons déjà réalisé des projets en collaboration avec la municipalité d’Istanbul et nous avons ainsi eu l’opportunité de travailler avec un artiste qui a réalisé de grandes fresques dans 3 lieux symboliques de la ville. Nous essayons d’intégrer la technologie dans nos travaux et avons donc pour but de poursuivre ce type de projet contribuant également à la rencontre culturelle. Notamment, en juin aura lieu une exposition des photos de Mathieu Forget, un danseur connu sur les réseaux sociaux. Il est venu en Turquie récemment et a pris plusieurs photos non seulement à Istanbul mais également à Bodrum, en Cappadoce, à Ankara et à Izmir, dans plusieurs sites touristiques. L’idée est de mettre en place des expositions dans l’ensemble de ces villes où les photos prises seront mises en avant et où les visiteurs pourront, à l’aide de leurs téléphones, transformer les photos en des vidéos dans lesquelles Forget danse.

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