Paroles de profs !

A l’occasion des 60 ans de l’établissement, d’anciens professeurs ont souhaité transmettre aux élèves passés et actuels certains souvenirs par une lettre : des messages pleins d’émotion où s’exprime leur vocation d’enseignants.

Mme Riahi, par Rüzgar Duyan. DR.

Témoignage de Mme Riahi, professeur de Philosophie (1987-2010)

Le Lycée français Pierre Loti à Istanbul est la pépinière des futurs cadres du pays. Il rassemble plus de 25 nationalités. C’est le berceau de la construction d’une fraternité entre les peuples, ce dont on a si grand besoin de nos jours. Il permet de « jeter des ponts » au lieu de construire de tristes murs !

Mes élèves de terminales au lycée Pierre Loti : une source inépuisable de souvenirs. Il y en a de toutes sortes : les élèves calmes et les autres ; mais même quand ils sont un peu turbulents, ils n’en restent pas moins, tous, polis, gentils, respectant toujours ce que prescrit la bienséance aux âmes bien nées. Certains ne manquent pas d’humour, avec souvent une once d’espièglerie. La malice est leur marque de fabrique. Tous, garçons et filles, ont un sens inébranlable de la camaraderie et de la solidarité ; leur devise, empruntée aux Mousquetaires : un pour tous, tous pour un ! On a tenté de semer, à l’adolescence, dans leur âme innocente de futurs citoyens, les bonnes graines qui vont fructifier, leur permettant, plus tard, de trouver leur chemin dans la vie. Ce mûrissement génère une petite « métamorphose » sur le plan moral et intellectuel que l’on observe en les croisant dans leur vie d’adultes. Quel attendrissement de les entendre affirmer qu’on en a été, un tant soit peu, l’architecte ; on songe toujours avec un brin de nostalgie à ce qu’ils appellent « leur éternelle gratitude ».

Longue vie à mes élèves qui m’ont, parfois, donné du fil à retordre quant au bon usage des concepts dans la construction d’un schéma argumentatif, mais toujours beaucoup de joie à voir leurs efforts et les progrès sensibles de leur esprit critique et leur capacité à penser par eux-mêmes.

Madame Riahi


M. Georges Doumergue. DR.

Souvenirs à propos du début de “Pierre Loti”, l’école française d’Istanbul : témoignage de M. Georges Doumergue, professeur de Lettres (1971-1973)

Nommé à partir de l’année scolaire 1971 professeur de français au Lycée de Galatasaray, je débarquai à Istanbul en gare de Sirkeci (ah ! la magie fatiguée de l’Orient Express !) au début de septembre 1971. Les collègues, avec qui je pris contact immédiatement, me parlèrent de l’Ecole française d’Istanbul, petite structure d’enseignement français, à laquelle il serait bon que je participe : c’était là le complément de mon enseignement au Lycée, une sorte de devoir sacré en somme ! Il fallait justement un enseignant de français ! c’est ainsi que pendant deux années scolaires j’ai enseigné dans cette structure qu’on appelait l’« école française d’Istanbul ». La plupart des enseignants étaient des professeurs des différents lycées francophones d’Istanbul. Le directeur en était Charles Zémor, mon collègue à Galatasaray, lequel deviendrait quelques années après Directeur des études françaises à Galatasaray, poste dans lequel je luı succèderais.

Nous faisions cours dans des salles de classe situées dans le consulat même, à l’arrière du bâtiment, au niveau de la cour du parking. Il y avait, je crois, quelques autres classes au niveau supérieur, mais l’espace intérieur du consulat a été tant de fois réaménagé que je ne saurais rien retrouver de la disposition d’autrefois. L’accès au consulat était beaucoup plus simple que de nos jours, où les conditions actuelles indispensables de sécurité, ont fait du lieu une sorte de forteresse. De nos classes, pendant les récréations, nous n’avions que quelques pas à faire pour nous trouver sur la place Taksim, à la configuration bien différente de celle de nos jours, et où de nombreux « büfe » proposaient de délicieux « kaşerli tost ».

L’atmosphère était presque familiale, la plupart des élèves étant les enfants de collègues ou d’agents des consulats étrangers, désireux de donner à leurs enfants un enseignement français de qualité. Nous avions de bons, de très bons élèves, et ces quelques heures de cours étaient vécues par l’ensemble des enseignants comme une halte bienfaisante dans leur programme hebdomadaire.

Je me souviens en particulier d’un élève hongrois, le fils du consul de Hongrie à l’époque. Il me rendait des dissertations remarquables, et je m’émerveillais qu’un élève, qui, n’avait derrière lui que deux ou trois années d’apprentissage du français, ait pénétré à ce point le génie de la langue ! Je regrette de n’avoir pas conservé copie de ces devoirs, mais la photocopie n’était pas très courante à l’époque. Quand je me penche par le souvenir sur ces années passées, je ressens une sérénité, une sorte de bonheur même. Il faut dire que j’étais jeune alors, que je venais d’entamer ma carrière, et que je découvrais un pays étranger, cette Turquie d’il y a un demi-siècle, où subsistait encore un peu du parfum ottoman.

M. Georges Doumergue, ancien professeur de Lettres


Mme Christiane Hégy Yücel, par Rüzgar Duyan. DR.

Témoignage de Mme Christiane Hégy Yücel, professeur de Lettres modernes (années 80 et 90)

Les 20 années passées au Lycée Pierre Loti ont été les plus heureuses de ma vie d’enseignante et j’y repense avec beaucoup de nostalgie et de bonheur. Des conditions de vie et de travail idéales, une équipe éducative soudée et solidaire et surtout des élèves exceptionnels qui donnaient envie de toujours faire mieux et de se surpasser tant ils étaient à l’écoute et en demande de savoir et de connaissances.

Merci à vous, mes anciens élèves, pour tout le bonheur que vous m’avez apporté, qui m’ont conforté dans mon désir d’enseigner et qui ont donné un sens à ma vie professionnelle.

Mme Christiane Hégy Yücel


Mme Annick Fidan Bonneau, par Rüzgar Duyan. DR.

Témoignage de Mme Annick Fidan Bonneau, professeur d’Histoire-géographie-éducation civique (1980 à 1987, puis de 1991 à 2001)

Plus de 20 ans passés au Lycée français « Papillon » devenu le Lycée Pierre Loti. C’est avec beaucoup d’émotion que je me rappelle de mes élèves polis, souriants et bienveillants qui ont accompagné mes débuts d’enseignement. C’est toujours avec beaucoup d’enthousiasme que je rentrai en classe pour y faire revivre les évènements de l’Histoire et aussi participer à la formation citoyenne de ces jeunes filles et jeunes garçons d’origines différentes mais si tolérants et solidaires.

Vous m’avez convaincue que j’avais fait le bon choix de devenir enseignante. Grâce à vous, j’ai pu poursuivre avec sérénité et conviction mon métier de professeur et je vous en remercie du fond du cœur. Vous étiez des élèves exceptionnels.

Mme Annick Fidan Bonneau

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